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Repas hyperprotéinés et satiété

Une diète riche en protéines a des effets anorexigènes et favorise la perte de masse graisseuse. La satiété implique des phénomènes hormonaux complexes dont la cible est l’hypothalamus.

De nombreuses études ont démontré que les protéines constituent le macronutriment impliqué dans le contrôle de la satiété. Elles permettent une perte de poids tout en assurant un maintien de la masse corporelle sèche. Les repas présentant un ratio protéines : hydrates de carbone relativement élevé permettent d’augmenter le sentiment de satiété et de diminuer l’ingestion d’aliments. Il a été suggéré que ce type de diète soit efficace dans le cadre d’un régime dont l’objectif est une perte de poids via ses effets sur la satiété, la thermogenèse et la répartition de l’énergie absorbée. Les protéines favorisent la libération de médiateurs anorexigènes tels que la cholécystokinine, le glucagon-like peptide-1 ou encore le peptide YY. La substitution des hydrates de carbones par des protéines dans le cadre d’une diète pauvre en lipides diminue la réponse à l’insulinémie et à la glycémie, ce qui favorise l’oxydation des graisses.

Avalanche d’hormones

Depuis la fin des années nonante, on sait que les protéines jouent un rôle important dans la satiété. En effet, elles diminuent la quantité d’énergie ingérée et l’appétit en période post-prandiale de façon plus importante que les hydrates de carbone et les lipides. De nombreux mécanismes ont été proposés afin d’expliquer cette hiérarchie des macronutriments. Parmi ceux-ci, on peut citer la capacité plus élevée des protéines à favoriser la thermogenèse et la néoglucogenèse au niveau de l’intestin. Le tractus gastro-intestinal libère des hormones impliquées dans la régulation de l’appétit au niveau du système nerveux central. Le glucagon-like peptide-1 (GLP-1) est sécrété par les cellules L de la partie distale de l’intestin grêle en réponse à l’apport énergétique. La cholécystokinine est libérée au niveau du duodénum et pourrait contribuer aux mécanismes induisant l’envie de cesser de s’alimenter. Ce rôle demeure néanmoins sujet à controverse. La ghréline est une hormone orexigène (stimulant l’appétit) synthétisée par les cellules oxyntiques de l’estomac. Sa libération est inhibée par l’absorption d’aliments. La libération de ces hormones semble être partiellement spécifique de certains macronutriments. Ceci expliquerait les différences observées entre protides, lipides et glucides sur la satiété. Le type de protéine ingéré aurait également un effet sur la réponse post-prandiale : celle-ci est différente selon que la diète est constituée d’un hydrolysat de protéines, de caséine ou d’albumine.

Une étude récente

Une étude australienne dont les résultats ont été publiés en 2006 a caractérisé la réponse hormonale face à plusieurs diètes administrées sous forme liquide. L’objectif était de comparer les effets des protéines de soja, de gluten et d’un hydrolysat de petit lait (whey) sur des marqueurs subjectifs et objectifs de l’appétit et les taux plasmatiques de ghréline, GLP-1, et cholécystokinine. Les auteurs ont également étudié l’effet de ces protéines sur le poids de sujets masculins. Leur index de masse corporelle (IMC) était supérieur à 20 kg/m² et leur âge compris entre 20 et 65 ans. Deux groupes ont été formés selon que les individus avaient un IMC inférieur ou supérieur à 25 kg/m². Les modifications des taux plasmatiques de ghréline, d’insuline, de cholécystokinine, et de GLP-1 ainsi que l’absorption d’énergie sont similaires quelle que soit la source de protéines (whey, soja ou gluten) mais différents de ceux observés lorsque du glucose est ingéré. Ceci suggère que ces hormones sont les médiateurs des effets supérieurs des protéines sur la satiété par rapport au glucose. Cette étude a également montré que le GLP-1 à jeun et en période post-prandiale est augmenté chez les sujets obèses (dont le IMC est supérieur à 25 kg/m²). Cependant, selon les données subjectives récoltées ceci ne semble avoir aucun effet sur la sensation de faim. Les différences observées entre macronutriments (protéines vs glucose) sont indépendantes du poids. Les différences d’absorption d’énergie en fonction de la source de protéines rapportées dans d’autres études n’ont pas été confirmées. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que les protéines ont été administrées sous forme liquide et non sous forme solide comme dans les études précédentes. Il faut donc envisager que la forme, liquide ou solide, puisse engendrer une certaine variabilité de la réponse post-prandiale dépendante de la vitesse de digestion et d’absorption des aliments ingérés. Les données suggèrent également que le sentiment de satiété plus grand faisant suite à la consommation de protéines comparé aux hydrates de carbone pourrait s’expliquer au moins partiellement par la suppression de la production de ghréline. Une telle diminution du signal orexigène pourrait diminuer la faim ou retarder le besoin de s’alimenter à nouveau. La libération de GLP-1 se révèle être prolongée plus longtemps par les protéines que par le glucose. Le profil de libération de la cholécystokinine est comparable à celui du GLP-1. Sa libération est également prolongée par la consommation de protéines plutôt que de glucose.

Pour avoir moins faim

On savait depuis une dizaine d’années que les protéines jouent un rôle dans la sensation de satiété. Elles stimulent la libération d’hormones anorexigènes, dont les plus connues sont le GLP-1, la cholécystokinine et le peptide YY. La comparaison de différentes sources de protéines au glucose indique que la libération de cholécystokinine et de GLP-1 est plus longue après ingestion de protéines qu’après ingestion de glucose. Les profils de libération de ces hormones au cours du temps sont comparables. La suppression de la production de ghréline pourrait expliquer en partie le sentiment accru de satiété ressenti après consommation de protéines plutôt que de glucose. Bref, en mangeant des protéines, on a moins faim.

Alexandre Dereinne, diététicien

Références:

Bowen J et al. Appetite Regulatory Hormone Responses to Various Dietary Proteins Differ by Body Mass Index Status Despite Similar Reductions in ad Libitum Energy Intake. J Endocrinol Metab 2006: 91; 2913 – 2919.


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