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Une vitamine qui a du cœur

La vitamine C exerce dans l’organisme beaucoup de fonctions différentes. Attardons nous quelque peu à son action protectrice contre les maladies cardiovasculaires

Ainsi que l’a expliqué, dans un symposium récemment organisé à Bruxelles autour de la vitamine C, le Professeur Jean Nève (ULB et Conseil Supérieur de la Santé), l’alimentation peut être un moyen de protéger sa santé. Des comportements alimentaires bénéfiques existent. Ils ont été identifiés, ainsi que leurs déterminants. Et la lutte contre les espèces oxygénées, responsables du stress oxydatif, est l’un de ces aspects car elle est possible à travers l’alimentation, de même que la protection des défenses immunitaires.

Quantités suffisantes

Mais bien entendu, ces protections ne sont possibles que si les substances qui y contribuent sont apportées dans l’alimentation en quantités suffisantes. Cette notion conduit à modifier les paradigmes en nutrition, a-t-il expliqué, et de passer d’une optique de nutrition adéquate à un objectif de nutrition optimale. Dans le premier cas, on vise essentiellement à prévenir les symptômes de déficience et à satisfaire les fonctions classiques qui dépendent du nutriment considéré. Dans le second, l’ambition est, comme le dit l’appellation du concept, d’optimaliser les effets bénéfiques du nutriment ou groupe de nutriments, sans nuire à la santé des individus. C’est dans cette nouvelle optique qu’on été élaborées par le Conseil supérieur de la Santé les recommandations nutritionnelles pour la Belgique, notamment en ce qui concerne la vitamine C. Comme conséquence du changement d’optique, la méthode a changé elle aussi. Alors que dans le passé, les critères qui servaient de base à l’établissement des recommandations étaient centrées sur les apports dont bénéficiaient les individus en bonne santé, ils prennent aujourd’hui en compte, en plus de ceux qui viennent d’être cités, un certain nombre de critères plus expérimentaux. Ainsi, à côté des rôles avérés d’un nutriment (prévention du scorbut, effet antioxydant et effet positif sur l’absorption du fer dans le cas de la vitamine C), il y a les rôles évoqués (prévention de cancers, de maladies cardiovasculaires, de troubles dégénératifs tels que la cataracte, toujours à propos de la vitamine C). Les études épidémiologiques, qui mettent en corrélation une concentration plasmatique du nutriment et une protection maximale contre les affections dans la prévention desquelles le nutriment peut jouer un rôle, sont également prises en compte. Des notions de physiologie, telles que l’absorption, la réabsorption tubulaire, d’éventuels cycles entéro-hépatiques, l’excrétion urinaire et fécale, le cas échéant, le stockage s’il y en a un, bref, la cinétique du nutriment dans l’organisme, viennent nuancer les orientations prises sur base des critères précédents. Et bien sûr, on tiendra compte de la tolérance et de l’existence d’éventuelles doses toxiques. L’intégration de toutes ces données conduit à l’élaboration d’un schéma illustrant la relation dose-effet et qui retrace l’entièreté du spectre des conséquences liées à chaque niveau d’apport, depuis la carence grave pouvant être mortelle, jusqu’à la toxicité, en passant par les apports adéquats, les apports optimaux et même les effets pharmacologiques. La figure suivante montre un schéma de ce type, présenté par le Prof. Jean Nève lors de sa conférence (tableau).

tableau explicatif

Vitamine C

Qu’en est-il pour ce qui concerne la vitamine C? On connaît ses nombreux rôles physiologiques, a rappelé lors du symposium le Pr Balz Frei, directeur du Linus Pauling Institute de l’Oregon State University aux USA. Elle joue le rôle de cofacteur auprès de différentes enzymes qui président notamment à diverses réactions d’oxydo-réduction. Elle prévient le scorbut et on a de bonnes raisons de penser (rôles évoqués) qu’elle prévient des affections cardiovasculaires telles que certains cancers et les affections cardiovasculaires. Les études observationnelles vont dans ce sens, a expliqué le Prof. Frei. On connaît la célèbre étude de Framingham, d’ailleurs toujours en cours, qui a montré que le risque de maladie cardiovasculaire était en relation directe avec le taux de LDL-cholestérol et en relation inverse avec celui du HDl-cholestérol. Depuis que ces données ont été publiées, de nombreuses autres études en ont apporté la confirmation. Il a également été démontré que le même risque cardiovasculaire était en rapport avec les taux des marqueurs de l’inflammation, parmi lesquels la CRP (C-reactive protein) a été très étudiée dans cette optique. Enfin, le rôle du stress oxydatif, en particulier son effet sur les LDL, est lui aussi bien connu et on sait que les LDL oxydées sont nettement plus athérogènes que les formes non oxydées. Le stress oxydant exerce aussi une action délétère sur l’endothélium. Il n’est pas étonnant, dès lors, que la vitamine C par son rôle antioxydant, assure une protection contre l’agression de l’endothélium et contre l’oxydation des LDL. Par cette double action, elle protège contre l’athéromatose et contre ses conséquences cardiovasculaires dramatiques. Une étude a montré que dans le plasma sanguin exposé à de l’AAPH, un générateur de radicaux libres, l’oxydation du cholestérol estérifié, des phospholipides et des triglycérides ne commençait que lorsque la concentration du milieu en vitamine C était devenue extrêmement basse, alors qu’avec d’autres agents antioxydants (urate, alpha-tocophérol, groupements –SH, ...), cette oxydation était déjà mesurable bien avant que les taux de ces agents ne soient fortement abaissés.

Tout un faisceau

Cela démontre bien l’effet protecteur de la vitamine C contre l’oxydation des lipides athérogènes. Cliniquement, la vitesse de propagation de l’onde pulsatile, utilisée comme marqueur de la rigidité artérielle, montre un meilleur état sous vitamine C qu’en cas d’insuffisance. La mesure échographique du diamètre vasculaire va dans le même sens, ainsi que l’évaluation de la dilatation artérielle endothélium dépendante. Toutes ces données, et d’autres encore pour lesquelles la place nous manque ici, constituent donc un faisceau d’arguments très convergents qui permettent de conclure au rôle protecteur de la vitamine C au niveau cardiovasculaire.

Dr Jean Andris

Références:

Frei B. Evidence supporting health benefits of higher (above-RDA) intakes of vitamin C. Conférence donnée au symposium «Les apports bénéfiques de la vitamine C – Quelle est la quantité optimale?», organisé par Danone Chiquita Fruits à Bruxelles, le 13 mai 2011.

Frei B, Stocker R, Ames BN. Antioxidant defenses and lipid peroxidation in human blood plasma. Proc Natl Acad Sci 1988; 85: 9748-52.

Gocke N, Keaney JF Jr, Hunter LM et al. Predictive value of non invasively determined endothelial dysfunction for long-term cardiovascular events inpatients with peripheral vascular disease. Am Coll Cardiol 2003; 41: 1769-75.

Kunsch Ch, Medford RM. Oxidative Stress as a Regulator of Gene Expression in the Vasculature. Circ Res 1999; 85: 753-66.

Nève J. Recommandations nutritionnelles en vitamine C pour la Belgique et alimentation optimale. Conférence donnée au symposium «Les apports bénéfiques de la vitamine C – Quelles est la quantité optimale ?», organisé par Danone Chiquita Fruits à Bruxelles, le 13 mai 2011.


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