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Nouvelles menaces microbiennes

Les contaminations bactériennes demeurent toujours la principale cause d’intoxications alimentaires. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, elles ne sont pas en augmentation, elles évoluent. Certains germes sortent désormais du lot, les “émergents”.

Par Nicolas Rousseau

" HEALTH & FOOD " numéro 57,
Janvier-Février 2003

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La contamination microbiologique des aliments est sans conteste un phénomène mal perçu ou mal compris par le grand public. A l’occasion du 5e Congrès de Nutrition et Santé*, le Prof. Georges Daube (Faculté de médecine vétérinaire, Université de Liège) a tenté de rétablir la vérité sur le sujet.

Pas de paranoïa !

Les récentes crises dans le secteur de la viande (dioxines, fièvre aphteuse, vache folle), explique le microbiologiste, incitent les consommateurs (voire les décideurs) à penser que de nouveaux problèmes liés à la sécurité alimentaire apparaissent de plus en plus souvent. Pour l’opinion, ces événements seraient même plus graves que par le passé et, surtout, de moins en moins maîtrisés. Bref, le climat est à la méfiance.

Il y a une dizaine d’années, une zoonose ( toute maladie susceptible de se transmettre de l’animal à l’homme) était bien souvent uniquement une maladie animale : tuberculose, brucellose, etc. La prévention était donc radicale puisqu’elle consistait purement et simplement en l’abattage des animaux malades. Aujourd’hui, la zoonose ne décime plus les animaux, mais ces derniers restent porteurs d’un agent infectieux susceptible de contaminer l’homme. C’est le cas de la salmonellose, de la yersiniose ou du syndrome urémique hémolytique (HUS), qui sont des maladies humaines, si bien que les actions de prévention sont certes plus difficiles, mais pas impossibles !

Pas plus, pas moins qu’avant

La chaîne alimentaire n’est pas plus contaminée aujourd’hui qu’auparavant. En fait, certains agents ont disparu de la circulation, mais ils ont été remplacés par d’autres…: les agents pathogènes “émergents”. “Il faut cependant distinguer le faux du vrai micro-organisme émergent”, souligne le Prof. Daube. Ainsi, l’apparition plus fréquente d’intoxications à Listeria monocytogenes, au Campylobacter ou à Aeromonas hydrophila est due au développement de méthodes de recherche et d’identification plus pointues. En clair, elles ne passent plus entre les mailles du filet. De même, les nouveaux outils moléculaires permettent de rechercher des agents autrefois non cultivables (Calicivirus de type Norwalk, Cryptosporidium) ou des facteurs de virulence d’agents connus (E. coli entérohémorragiques). S’ils ont été longtemps négligés, tous ces agents étaient déjà probablement impliqués depuis longtemps dans les toxi-infections.

Tous responsables

On ne vit plus actuellement comme au début des années 50’. Un constat banal qui se répercute dans l’assiette, avec l’avènement de “vrais” émergents, tributaires des changements opérés par l’homme à tous les stades de la chaîne alimentaire. Parfois, il s’agit réellement de la survenue d’un nouvel agent pathogène comme l’E. coli entérohémorragique de sérotype O157:H7 (le cas typique du hamburger insuffisamment cuit) ou, peut-être, de l’encéphalopathie spongiforme bovine (pourquoi avoir diminué la température de stérilisation des farines animales ?). Plus souvent, ce sont de légères modifications de certaines souches ou de la susceptibilité de l’hôte qui leur donnent un avantage compétitif. Ainsi, les progrès de la médecine elle-même, notamment à travers les traitements anticancéreux ou immunosuppresseurs, qui augmentent la sensibilité individuelle, permettent à certains germes saprophytes (entérobactéries, protozoaires), de devenir pathogènes.

Attention au poulet

Le microbiologiste souligne aussi l’influence de la modification des pratiques de commerce, d’élevage (industriel), d’abattage, de transformation, de distribution, mais aussi de consommation. Ainsi, les barbecues et fondues “parties” sont souvent responsables de contaminations croisées (entre cru et cuit) à Campylobacter. L’aliment le plus suspect est sans nulle doute la volaille, en particulier le poulet, porteur naturel du Campylobacter, loin devant la viande de porc. Heureusement, depuis 1999, le taux de contamination est en chute libre sur tous les morceaux. Dans le bœuf, le niveau de contamination à E. coli O157 semble quant à lui se stabiliser, ce qui montre tout de même l’efficacité du plan de surveillance mis en œuvre dans le pays… Mais cela ne dispense pas le consommateur de prendre toutes les précautions d’hygiène et d’éviter notamment les contaminations croisées, si fréquentes chez les particuliers.

Nicolas Rousseau
Diététicien Nutritionniste

* 5e Congrès de Nutrition et Santé, vendredi 15 et samedi 15 novembre 2002, Palais des congrès, Bruxelles. Plus d’infos : http://mda04.fmv.ulg.ac.be

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