Par Nicolas Rousseau
" HEALTH & FOOD " numéro 61,
Octobre-Novembre 2003
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Cinq portions de fruits et légumes par jour… Le message fait désormais partie des objectifs nutritionnels de dernière génération. Ce chiffre n’est pas choisi au hasard, il repose avant tout sur plusieurs études épidémiologiques, mais également sur quelques études d’intervention, indiquant que l’apport en fruits et en légumes devrait atteindre au moins 400 g par jour. Les bienfaits de cette catégorie d’aliments sont de plus en plus évidents. Et la soupe est une façon de consommer des légumes. Elle était à l’honneur lors du Symposium Knorr Nutrition, dans le cadre de la 9th European Nutrition Conference*.
Pas de tartine sans soupe
C’est dans les vieux pots qu’on fait les bonnes soupes, dit l’adage… Et cet élixir, vieux comme le monde, contribue activement à l’objectif “5 a day”, avec quelques atouts antioxydants en prime. En effet, un protocole satellite de l’étude SU.VI.MAX (pour SUppléments en Vitamines et Minéraux AntiOxydants), présenté par le Dr Serge Hercberg, son coordinateur, montre clairement que la consommation régulière de soupe apporte une quantité non négligeable d’antioxydants. Selon cette étude, qui comportait 2114 hommes et 2874 femmes suivis pendant 2 ans, les grands consommateurs de soupe (qui en boivent de 9 à 12 portions par 12 jours, soit quasiment tous les jours), représentés par 6,7 % des femmes et 8,7 % des hommes, bénéficient des apports les plus importants en antioxydants. Chez ces personnes, la soupe couvre 12,5 % (pour les hommes) et 13 % (pour les femmes) des apports totaux en bêta-carotène ou provitamine A. Elle assure aussi 4 à 5 % des apports en vitamine C, en vitamine E et en vitamine B9. Enfin, si elle ne fait pas maigrir en soi (même si elle est aux choux !), elle modifie favorablement la composition de l’alimentation, au profit des glucides et au détriment des lipides.
Le cancer en point de mire
A côté de la soupe, des indices probants et convergents montrent qu’à partir de 5 portions de fruits et légumes par jour, on contribue, entre autres, à réduire sensiblement le risque de cancer. Le Prof. Attilio Giacosa, de l’Institut National italien de Recherche contre le cancer, à Gènes, prend pour témoin l’étude EPIC (European Prospective Investigation Into Cancer) qui comporte près d’un demi-million d’Européens. Celle-ci montre explicitement qu’une consommation accrue de légumes contribuerait, par exemple, à réduire de 18 % le risque de cancer du côlon, de 28 % le risque de cancer de l’estomac et, pour les fruits, de 30 % le risque de cancer de l’estomac et de l’oesophage.
Plusieurs hypothèses sont actuellement avancées pour expliquer cet apport bénéfique des végétaux. En premier lieu, la présence importante d’antioxydants dans les fruits et légumes, mais qui étaye uniquement l’inhibition du stress oxydatif. Un autre mécanisme de protection résiderait dans l’induction d’enzymes métaboliques par des constituants des fruits et légumes. A titre d’exemple, les crucifères (choux, brocolis, navets…) activent le CYP1A2, une enzyme impliquée dans l’épuration des amines aromatiques et d’autres carcinogènes alimentaires. Par ailleurs, de nombreuses substances contenues dans les végétaux, comme le caroténoïde lutéine ou les coumarines des agrumes, semblent agir sur l’expression des gènes.
Enfin, les végétaux pourraient aussi intervenir directement dans le processus de réparation de l’ADN de certains gènes. A ce sujet, conclut le gastroentérologue, le rôle de l’acide folique est de mieux en mieux établi dans la prévention de la rupture de chromosomes ou de l’hypométhylation de l’ADN.
Certes, ce ne sont encore que des hypothèses, mais elles ne peuvent que nous encourager à consommer davantage de fruits et légumes. Et cinq par jour n’est certainement pas une mission insurmontable…
Nicolas Rousseau Diététicien Nutritionniste
* Rome, 1-4 octobre 2003. |