Par Nicolas Guggenbühl
News du :
19 Février 2004
|
Le fer est un des oligo-éléments qui fait l'objet d'une des déficiences les plus courantes et les mieux documentées dans nos sociétés nanties. Et ce sont les femmes qui sont les premières concernées, leur besoin étant pratiquement deux fois plus important que pour les hommes, en raison des pertes survenant lors de menstruations.
Mais le fer est une arme à double tranchant. Car en marge de son rôle indispensable à la constitution de l'hémoglobine, il peut aussi catalyser la formation de certains radicaux libres comme le groupement hydroxyle, un puissant oxydant qui agresse les membranes cellulaires, les lipides, les protéines, l'ADN et cause des dommages aux tissus. Certains travaux suggèrent que l'accumulation de fer peut réduire l'efficacité de l'insuline (phénomène de résistance à l'insuline) et altérer sa sécrétion par le pancréas.
Plus de 32000 échantillons
Le diabète de type 2 représente une des grandes complications connues de l'hémochromatose, une maladie qui se caractérise par une absorption intestinale du fer anormalement élevée. Dans le passé, plusieurs études ont déjà rapporté l'existence d'une association entre des réserves martiales importantes, estimées par un taux de ferritine élevé, et un risque accru de diabète. Toutefois, l'interprétation de ces observations est délicate, dans la mesure ou un taux élevé de ferritine peut aussi être une conséquence du diabète et d'un état inflammatoire qui l'accompagne.
D'où l'importance de cette nouvelle étude, effectuée par une équipe de l'école de santé publique de Harvard, à Boston, où des échantillons de sang de plus de 32 000 infirmières saines ont été récoltés. Après 10 ans, l'apparition du diabète de type 2 a pu être confrontée aux analyses visant à évaluer les réserves martiales de l'organisme (taux de ferritine dans le plasma et rapport entre les récepteurs à la transferrine et la ferritine).
Les résultats montrent clairement que plus réserves de fer sont importantes, plus le risque de diabète de type 2 est élevé. Et cette association n'est pas modifiée après correction pour plusieurs facteurs de risque, tels que l'indice de masse corporelle (BMI), le statut ménopausique, la consommation d'alcool ou encore le taux de protéine C-réactive, un marqueur de l'inflammation.
A noter que les mêmes chercheurs de Harvard viennent de publier une autre étude montrant, sur base d'un échantillon de quelque 38 000 hommes, une association entre la consommation de viande rouge et le risque de diabète, alors que rien n'apparaît pour la consommation totale de fer. Tout n'est donc pas encore très clair, si ce n'est qu'il semble bien que pour la viande rouge (riche en fer,) on ne peut que plaider la modération.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Ref. :
(1) Jiang R et al. JAMA 2004 ;291 :711-17.
(2) Jiang R et al. Am J Clin Nutr 2004 ;79(1) :70-5. |