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Dépister une allergie, parcours du combattant?

Les allergies alimentaires se manifestent sous une multitude de formes, allant de la dermatite atopique au choc anaphylactique, en passant par des troubles gastro-intestinaux. Leur diagnostic peut donc parfois s’avérer quelque peu laborieux. Il existe heureusement plusieurs outils et techniques pouvant faciliter la tâche du praticien dans sa démarche diagnostique.

Les allergies alimentaires ne sont pas rares chez nous : leur prévalence dans la population adulte est d’environ 3 à 4% tandis que chez l’enfant, elle est atteint 6 à 8%. Il existe de nombreux tests pouvant être pratiqués dans le but de diagnostiquer avec précision une allergie alimentaire.

Anamnèse

La première étape permettant d’orienter l’enquête allergologique est l’histoire clinique du patient. Les symptômes provoqués par une allergie alimentaire surviennent le plus souvent dans les deux heures qui suivent l’ingestion de l’aliment en cause. Dans le cas d’une dermatite atopique, le délai est toutefois plus difficile à évaluer car les lésions sont permanentes et l’aggravation de l’eczéma peut survenir jusqu’à près de 24 heures suivant la consommation. L’anamnèse est évocatrice pour peu que les symptômes soient directement liés à l’exposition alimentaire (ingestion, inhalation ou contact), ou encore s’ils sont récidivants et/ou s’ils sont graves.

L’histoire clinique du patient peut conduire, surtout en cas de dermatite atopique ou d’urticaire chronique, à une enquête alimentaire réalisée grâce à un semainier reprenant tous les ingesta. Ce carnet alimentaire permet notamment de dépister les fausses allergies alimentaires, comme celles provoquées par un régime trop riche en histamine et tyramine, par exemple. Cet interrogatoire permet également de repérer la consommation d’aliments masqués. Elle donne en outre des informations portant sur l’équilibre nutritionnel du patient.

Tests cutanés

Les premiers tests effectués dans la démarche diagnostique sont les tests cutanés. Ils sont pratiqués à l’aide de «prick» avec des extraits d’allergènes suspectés. La spécificité et la valeur prédictive négative de ces tests sont excellentes si les réactifs utilisés sont frais, de telle sorte que leur négativité peut exclure une sensibilisation alimentaire.

En revanche, un test cutané positif n’est que le reflet d’une sensibilisation de l’organisme vis-à-vis d’un aliment et impose de poursuivre les investigations afin de confirmer si oui ou non il existe bel et bien une allergie alimentaire.

Les tests épicutanés aux aliments pourraient représenter une technique d’avenir chez le nourrisson atteint de dermatite atopique. Il serait donc intéressant de standardiser les extraits alimentaires des tests épicutanés pour permettre une utilisation en routine.

Recherche d’hyperéosinophilie

Recherche d’hyperéosinophilie Un résultat supérieur à 400 lors de ce test constitue un argument en ce qui concerne l’origine allergique des troubles. Cependant, il est important de noter que ce test manque de spécificité et qu’il convient d’interpréter les résultats avec la plus grande prudence car une hyperéosinophilie peut également se déclarer lors d’une parasitose, d’un stress ou lors de la prise de médicaments par un enfant atteint d’une infection virale.

Dosage des IgE totales et spécifiques

Le dosage des IgE totales est beaucoup moins sensible et moins spécifique que les tests de dépistage du terrain allergique dans l’identification d’un terrain atopique. Il existe en effet de nombreuses pathologies entraînant une augmentation des IgE totales. Comme exemple, citons le cas des infections virales.

A côté du dosage des IgE totales, il existe également un test de dosage des IgE spécifiques qui peut s’avérer nécessaire dans les cas ou il existe une discordance entre l’anamnèse et les tests cutanés, ou lorsque la pratique de ces derniers n’est pas possible.

Test d’éviction alimentaire

L’éviction alimentaire doit toujours être orientée par la clinique, la positivité des tests cutanés et/ou du dosage des IgE spécifiques. En cas de dermatite atopique ou d’urticaire; l’amélioration des symptômes grâce à l’éviction de l’aliment suspecté pendant 3 à 4 semaines permet d’évoquer le rôle de ce dernier dans le déclenchement des manifestations.

De même, lors de la réintroduction de la denrée suspectée dans l’alimentation du patient, la réapparition de symptômes est un argument supplémentaire en faveur de l’allergie. Les effets de l’éviction de l’allergène alimentaire sont variables en fonction des symptômes. L’amélioration est bien souvent immédiate pour des symptômes d’urticaire ou d’asthme et plus tardive pour une dermatite atopique.

Provocation orale

Le test de provocation orale consiste en l’exposition de l’organe cible à l’allergène présumé responsable des manifestations et à la mesure de la réponse au niveau de cet organe. Ce test est très souvent utilisé lors de la suspicion d’une allergie alimentaire afin de confirmer le diagnostic.

Le patient ingère des quantités croissantes de l’aliment suspecté (ou d’un placebo) dans le but d’observer une quelconque réaction cutanée, respiratoire ou encore digestive. Etant donné les risques que présente ce genre de test, il est toujours pratiqué en milieu hospitalier.

Pas de méthode unique

Il n’existe malheureusement pas de panacée pour réaliser le diagnostic d’une allergie alimentaire. La démarche débute néanmoins systématiquement par des «prick-tests» cutanés, éventuellement complétés par le dosage des anticorps IgE spécifiques à l’aliment suspecté.

Lors du diagnostic, si l’histoire clinique est convaincante, comme par exemple un choc anaphylactique survenu dans l’heure suivant l’ingestion d’un aliment isolé et ayant nécessité un traitement médical d’urgence par exemple, il n’est alors pas nécessaire de pratiquer un test de provocation oral pour diagnostiquer l’allergie alimentaire.

En dehors de cette situation, il est important de pratiquer systématiquement des examens complémentaires. L’enquête diagnostique est poursuivie par un régime d’exclusion, et dans la majorité des cas l’allergie alimentaire est authentifiée par la pratique de tests de provocation orale.

Adrien Loreis

Références:

Gerez I, Shek L, Chng H et al. Diagnostic tests for food allergy. Singapore Med J 2010; 51(1) : 4-9.
http://smj.sma.org.sg/5101/5101ra1.pdf
Article en anglais consulté en mars 2010.

Rancé F, Giordano-Labadie F. Intérêt des tests épicutanés dans la dermatite atopique du nourrisson. Revue Française d’Allergologie et d’Immunologie Clinique 2001; 41: 373 - 81.
doi:10.1016/S0335-7457(01)00040-5


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