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La lente construction d’un bon capital osseux

Des produits comme le lait, qui ont littéralement servi l’Humanité pendant des millénaires, sont aujourd’hui la cible de fausses vérités. C’est comme si le lait était tout d’un coup devenu mauvais. Pourtant, la recherche confirme continuellement son intérêt.

Il paraît tout-à-coup que le lait n’a pas d’intérêt dans la prévention de l’ostéoporose. Voilà bien une affirmation pour le moins étonnante. Rappelons que la masse osseuse – on parle aussi de capital osseux, évolue tout au cours de la vie et commence à décroître dans la quarantaine, pour faire courir le risque à l’individu, en particulier la femme après la ménopause, de passer en dessous du seuil fracturaire. Mais plus le capital osseux est important lorsqu’il est à son maximum, moins ce risque est réel. Or c’est au cours de son enfance et de sa jeunesse qu’on le constitue et mieux on s’y prend, plus il est élevé. C’est ce qui a fait dire à certains rhumatologues que « l’ostéoporose est une maladie d’enfance ».

Les moyens de renforcer son capital osseux sont nombreux et connus. Ils sont bénéfiques à tout âge et régulièrement répétés par les sociétés scientifiques concernées1,2. Les apports en calcium, phosphore (dans des proportions adéquates), protéines et vitamine D sont au centre des moyens alimentaires. Il y a aussi la pratique d’une activité physique, l’abstention du tabagisme, la modération de la consommation d’alcool. Et lorsqu’il est acquis, ce capital osseux doit être préservé : à ces moyens vient s’ajouter, chez la femme, le traitement substitutif de la ménopause. Bien entendu, ceci doit se faire sous contrôle médical.

Une place centrale

Le lait et les produits laitiers, on le sait, constitue l’un des apports les plus importants en nutriments utiles à la constitution d’un bon capital osseux. Les études sont innombrables pour le démontrer, ainsi que l’ont rappelé les experts lors d’une réunion consacrée par le Centre de Recherche et d’Information Nutritionnelles (CERIN) 3 aux liens entre le lait et la santé. Nous pouvons en reprendre quelques-unes. Et il est intéressant de commencer par le début, avec une question dont l’exploration est à peine commencée mais qui mérite d’être posée, celle de la croissance fœtale sous l’effet de la consommation maternelle de lait. Une revue très récente de la littérature par des auteurs scandinaves4. Bien que peu d’études structurées soient disponibles, ils concluent en disant que les données actuellement disponibles suggèrent qu’une consommation modérée de lait, par rapport à une consommation faible ou nulle, est positivement associée à la croissance fœtale et au poids de naissance dans les populations occidentales en bonne santé. Et même lorsque l’enfant naît prématurément, il y a intérêt à lui apporter du lait dans son alimentation pendant son enfance et même au début de l’âge adulte. Renforcer les apports en fruits et légumes, ainsi qu’en produits laitiers, disent les pédiatres et endocrinologues qui se sont penchés sur la question3, est susceptible de diminuer chez eux le risque ultérieur de maladie cardiovasculaire et d’ostéoporose.

Densité renforcée

L’effet des produits laitiers sur la densité minérale osseuse a été évalué maintes fois. Ainsi, dans un groupe d’adolescents coréens, Shin et al.4 ont montré que c’étaient ceux qui avaient un modèle alimentaire incluant le lait et les céréales au plus haut niveau de consommation pour la population étudiée, qui avaient la plus faible probabilité d’une densité minérale osseuse basse. Cette association ne se retrouvait pas dans d’autres profils alimentaires identifiés dans la population étudiée. Il semble toutefois que cet effet soit différent selon le site osseux utilisé comme référence. Ainsi, aux USA, Sahni et al.5 Ont interrogé plus de 3200 personnes de 26 à 85 ans sur leur consommation de produits laitiers et ont mesuré leur densité minérale osseuse en différents endroits. La consommation de produits laitiers était en grande partie liées à la densité minérale osseuse mesurée au niveau de la hanche et de la colonne. La crème et le fromage (encore faudrait-il savoir lequel) ne montraient pas cette association. Enfin, la consommation de yoghurt était surtout liée à la densité osseuse du col du fémur. On sait que c’est là un des sites préférentiels des fractures ostéoporotiques. Ce constat va d’ailleurs dans le même sens qu’ont fait Wƚodarek et al., qui ont enregistré des apports de calcium via les produits laitiers moins importants chez les femmes de plus de 55 ans qui avaient une densité osseuse insuffisante au niveau de la hanche, par rapport à celle qui étaient dans les normes pour cette densité. Ces apports étaient également moins importants chez celles qui avaient déjà subi des fractures que chez celles qui n’en avaient jamais encouru. Et ce ne sont là que quelques exemples …

Références:

Cianferotti L, Brandi Ml. Guidance for the diagnosis, prevention and therapy of osteoporosis in Italy Clin Cases Miner Bone Metab. 2012; 9(3): 170–178.

Schurman L, Bagur A, Claus-Hermberg H et al. Guías 2012 para el diagnóstico, la prevención y el tratamiento de la osteoporosis. Medicina (Buenos Aires) 2013; 73: 55-74 Centre de Recherche et d’Information Nutritionnelles (CERIN). On entend dire que le lait. Conference Report, December 18th, 2012, Brussels.

Shin S, Hong K, Kang SW et al. A milk and cereal dietary pattern is associated with a reduced likelihood of having a low bone mineral density of the lumbar spine in Korean adolescents. Nutr Res. 2013; 33(1): 59-66.

Brantsæter AL, Olafsdottir AS, Forsum E et al. Does milk and dairy consumption during pregnancy influence fetal growth and infant birthweight? A systematic literature review. Food & Nutrition Research 2012. 56: 20050 - HYPERLINK "http://dx.doi.org/10.3402/fnr.v56i0.20050" http://dx.doi.org/10.3402/fnr.v56i0.20050.

Kaseva N, Wehkalampi K, Hemiö K et al. Diet and Nutrient Intake in Young Adults Born Preterm at Very Low Birth Weight.J Pediatr. 2013 Feb 4. pii: S0022-3476(12)01565-X. doi: 10.1016/j.jpeds.2012.12.076. [Epub ahead of print]

Sahni S, Tucker KL, Kiel DP et al. Milk and yogurt consumption are linked with higher bone mineral density but not with hip fracture: the Framingham Offspring Study. Arch Osteoporos. 2013; 8(1-2): 119.

Włodarek D, Głąbska D, Kołota A et al. Calcium intake and osteoporosis: the influence of calcium intake from dairy products on hip bone mineral density and fracture incidence - a population-based study in women over 55 years of age. Public Health Nutr 2012. [Epub ahead of print].


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