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Les omega-3, à l'aube de l'intelligence ?

Anthropologie et nutrition sont-il étroitement liés? Le quatrième congrès de nutrition et santé * s’est attaché à nous démontrer que l’alimentation a joué un rôle déterminant dans l’évolution de l’intelligence humaine.

Par Nicolas Rousseau

" HEALTH & FOOD " numéro 50,
Janvier 2002

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Dans son apologie sur l’évolution de l’homme, le Prof. Crawford (Institute of Brain Chemistry, Londres) a rappelé à quel point l’histoire humaine est fortement liée à l’environnement aquatique. Nous serions-nous trompés quant à l’origine des Homo sapiens? Il faut probablement remonter plusieurs centaines de milliers d’années pour apporter un semblant d’explication à cette méprise. Pour ce spécialiste du cerveau, si l’homme descend bien du singe, c’est en quittant les savanes pour les plaines côtières que l’évolution de son cerveau a devancé celle du primate.

Le dha, chaînon manquant?

En se rapprochant de la mer, l’homme s’est exposé, par son comportement alimentaire plus “marin”, à un nutriment déterminant pour le développement du cerveau, l’acide docosahexaénoïque (DHA ou C 22:6 n-3). Cet acide gras, et accessoirement l’acide arachidonique, serait directement impliqué dans la genèse des fonctions cérébrales. Son importance a été notamment démontrée chez le singe pour la vision, le comportement ou encore les capacités d’étude et de mémorisation. Chez l’homme, on observe que le DHA est essentiel à la vie, comme en témoignent ses concentrations dans le placenta et la protection qu’il assure contre la mort subite du nouveau-né. Il est probablement capital aussi pour le développement du système nerveux du petit enfant, tant son influence est bénéfique dans certaines maladies congénitales comme l’adrénoleucodystrophie ou la maladie de Zellweger.

Le génome en point de mire

Pourquoi les grands animaux terrestres étaient-ils affublés d’un cerveau de petite taille en comparaison de celui d’un mammifère plus petit comme le dauphin ? Celui-ci, réputé pour son intelligence, mange beaucoup de poissons, donc de DHA. Le sous-entendu peut paraître élémentaire, mais il trouve aujourd’hui de plus en plus d’évidences non seulement dans les fossiles, mais aussi dans le génome humain. Pour le Prof Crawford, l’identification du génome, beaucoup moins prolixe qu’attendu, indique qu’il y a très peu de gènes pour expliquer le comportement humain. Plusieurs gènes, comme celui qui code pour la synthèse de DHA, ont été conservés depuis des millions d’années. Ceci suppose que ce sont les interactions environnementales, dont fait partie la fourchette, qui orchestrent les changements du génome humain.

L’eau, source de “survie”

Le Prof. Crawford pousse la réflexion plus loin en formulant l’hypothèse que les maladies de civilisation contemporaines sont sans doute associées à un manque, dans notre assiette, d’acides gras oméga-3 en général et de DHA en particulier. En effet, de nombreux travaux ont montré le bénéfice du DHA pour la santé du cœur et des artères, donc indirectement pour le cerveau. Dans les pays où l’on consomme le moins de poissons, on assiste également à une plus grande fréquence de la violence, des états suicidaires et dépressifs et à une baisse du quotient intellectuel… La physiologie humaine est adaptée à un certain type d’alimentation depuis des millions d’années. Elle n’est donc vraisemblablement pas conçue pour ce que nous lui proposons actuellement. Faut-il encore se convaincre de notre origine marine en constatant qu’il est inné pour l’homme de savoir nager, mais qu’il doit bel et bien apprendre à marcher…

Nicolas Rousseau
Diététicien Nutritionniste

* Bruxelles, Palais des Congrès, 29-30 novembre 2001

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