Par Nicolas Rousseau
" HEALTH & FOOD " numéro 52,
Mai 2002
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Connaissez-vous les aliments fonctionnels ? Laitages probiotiques et/ou prébiotiques, margarines enrichies en phytostanols ou en phytostérols, margarines aux oméga 3…. Quelle est leur place dans notre alimentation ? Le consommateur ne risque-t-il pas de s’identifier trop rapidement à des aliments « miraculeux » ? A concepts nouveaux, communication nouvelle et c’est pourquoi les différents acteurs de la santé se sont réunis pour en débattre à l’occasion d’une table ronde organisée par Nelson DC lors du salon Life2 *.
L’année de tous les dangers
Actuellement, il n’existe pas de cadre réglementaire sur les aliments fonctionnels au niveau européen. Tout est donc « théoriquement » interdit sur le plan de la communication en rapport avec la santé, même s’il est aisé de contourner l’obstacle. On joue alors sur les mots, certains stimuleraient le corps et l’esprit, d’autres vous feraient mincir…
L’initiative de la FEVIA (Fédération de l’Industrie Alimentaire) d’élaborer un code de bonne conduite pour les aliments fonctionnels est donc à saluer. Construit au départ d’une plate-forme qui regroupe les différents acteurs du secteur alimentaire, ce code de valeur est cette année en voie de finalisation. « Lorsqu’il aura adopté sa forme définitive, il prendra cours pour trois ans, sous la surveillance du Ministère de la Santé Publique (MSP)», explique Monsieur Albert d’Adeski, Directeur Général de l’Administration de la Protection de la Santé au MSP. En effet, si l’autorité constate des dérapages, elle appliquera des mesures restrictives afin de stopper la commercialisation du produit contrevenant au code. Cependant, il faut souligner qu’il n’aura aucune force légale, tant que l’Europe n’aura pas établi de législation en la matière.
La dose fait le poison…
Les professionnels de la santé s’étonnent de l’ampleur du phénomène. Ainsi, pour le Dr Hanson, interniste (Hôpital Molière, Longchamp), « les aliments fonctionnels n’offrent actuellement pas encore toutes les garanties de sécurité attendues ». Selon lui, le risque existe que ces aliments soient consommés en trop grandes quantités, parfois en lieu et place d’aliments « sains » et « naturels ». Quelle influence, dès lors, leur consommation journalière peut-elle avoir sur la santé ? Une question sans réponse qui dépasse aujourd’hui le contexte même de l’avènement de ces nouveaux aliments. Le Dr Hanson critique également le manque cruel d’informations disponibles pour les médecins. Maurice Heinhorm, rédacteur en chef du Journal du Médecin, tient le même langage : « beaucoup trop de choses restent à prouver et il se pose toujours le problème de la dose ». Soulignons cependant que la problématique de la dose n’est en rien spécifique aux aliments fonctionnels : il y a belle lurette que des aliments enrichis en nutriments ont fait leur apparition sur le marché et que les doses maximales autorisées sont clairement spécifiées par la législation.
Communiquer l’équilibre
Louis Lambo, Directeur Général de Nelson DC, insiste à ce titre sur la nécessité d’envisager la communication autrement pour les aliments fonctionnels. Elle doit avant tout être réalisée par des spécialistes, car elle s’adresse aussi aujourd’hui directement au grand public.
Celui-ci doit donc comprendre pour apprendre…
Pour Patrick Mullie, diététicien, en Belgique, on investit encore trop peu dans l’alimentation saine. Le Belge mange mal et nos enfants sont de plus en plus gros. Les aliments fonctionnels ne résoudront pas tous les problèmes. Evitons les miroirs aux alouettes !
Peut-être faudra-t-il attendre les résultats de la grande enquête nationale (le BIRNH 2), qui devrait débuter fin 2002, pour que les politiques soient enfin confrontés à la dure réalité…
Nicolas Rousseau
Diététicien Nutritionniste
* Fondation Hodie Vivere. Cycle Société et Aliments. Life2. 23 mars 2002. Brussels Expo. |