Health and Food
98 Automne 2009
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Des chercheurs de l’Université de Washington ont comparé dans une étude les habitudes alimentaires et le coût de la nourriture d’un échantillon de 164 adultes habitant la ville de Seattle, près de Washington.
Reflet de la qualité
La densité énergétique de la nourriture, en d’autres termes, l’énergie disponible par quantité d’aliment, est un bon indicateur de la qualité de l’alimentation. A ce titre, les viandes maigres, le poisson, les produits laitiers allégés en matières grasses, les légumes et les fruits frais fournissent moins de calories par unité de poids que les hamburgers, sucreries en tous genres et desserts. A l’inverse, une alimentation à forte densité énergétique fournit plus de calories par unité de poids mais est relativement pauvre en nutriments essentiels.
Plusieurs études ont démontré qu’il existait une association entre une alimentation à faible densité énergétique et comportant de nombreux nutriments essentiels, avec un moindre risque de prise de poids, d’obésité, de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires, ainsi qu’avec un taux plus faible de certaines formes de cancers. Inversement, il a été prouvé qu’une alimentation faible en nutriments intéressants mais à forte densité énergétique était associée à une augmentation de bon nombre de pathologies.
Au vu de ces constations, il semble que l’amélioration de la qualité de l’alimentation par diminution de la densité énergétique puisse constituer un bon point de départ dans le contrôle du poids, la prévention de certains cancers et l’amélioration de la santé globale.
Bien manger coûte cher ?
Lors de l’étude réalisée par les chercheurs de l’Université de Washington, 164 participants (103 hommes et 61 femmes) ont dû enregistrer leur fréquence habituelle de consommation d’un panel de 152 aliments et 22 boissons et indiquer la taille des portions consommées. Ils ont également remplis un carnet alimentaire de 4 jours et complété des questionnaires portant sur la démographie et le comportement.
Au vu des résultats obtenus, nous avons pu constater que pour les hommes, comme pour les femmes, une alimentation plus dense en énergie était associée a une ingestion plus grande de graisses totales et d’acides gras saturés ainsi qu’à une consommation moins importante de fibres alimentaires, de potassium de vitamines A et C.
Les coûts alimentaires quotidiens (en $/ jour) étaient légèrement supérieurs chez les hommes par rapport aux femmes (6,72 $/jours contre 6,21$/jours), reflétant ainsi le fait que les hommes mangent plus que les femmes. Cependant, cette différence s’inversait après ajustement pour l’énergie. Pour chaque 2000 kcal d’énergie alimentaire, les hommes dépensaient en moyenne 7,43$ en comparaison à 8,12$ dépensés par les femmes. Lors de cette étude, les régimes alimentaires qui étaient plus onéreux en terme de $/2000kcal présentaient également une plus faible densité énergétique et contenaient davantage de nutriments essentiels.
Question de revenus et d’éducation ?
Les résultats de cette étude montrent que la qualité de l’alimentation est non seulement associée à des coûts supérieurs lorsque l’on se base sur un apport énergétique de 2000 kcal mais également à des revenus plus élevés par ménage ainsi qu’à un niveau d’éducation plus élevé. Ce dernier est un facteur dominant par rapport aux autres. Les répondants ayant le niveau d’éducation le plus élevé ont reporté avoir une alimentation de meilleure qualité et donc plus coûteuse, indépendamment du revenu par ménage.
Pablo Monsivais et Adam Drewnowski, de l’Université de Washington concluent : « la découverte selon laquelle une alimentation de meilleure qualité serait consommée par des personnes ayant un statut socio-économique plus élevé et serait plus coûteuse par 2000 kcal pourraient avoir des implications dans les études épidémiologiques concernant l’alimentation et les maladies chroniques. L’épidémiologie nutritionnelle a historiquement été basée sur les prémisses selon lesquels l’exposition aux nutriments était directement liée à la santé.
Cependant, le statut nutritionnel semble également intimement lié au statut socio-économique, et les découvertes reportées dans cette étude soulèvent la possibilité que le coût monétaire supérieur d’une alimentation de bonne qualité nutritionnelle pourrait fournir une explication à ces observations.
Des études futures, basées sur des échantillons plus représentatifs, seront cependant nécessaires pour élucider la connexion entre la qualité de l’alimentation et le coût de celle-ci à travers les strates socio-économiques.
Alexandre Dereinne, diététicien
Références
Monsivais P, Drewnowski A. Lower-energy-density diets are associated with higher monetary costs per kilocalorie and are consumed by women of higher socioeconomic status. Journal of the American Dietetic Association 109;5. Mai 2009. |