Des chercheurs belges de l'Université libre de Bruxelles viennent de publier de nouvelles données de la célèbre étude BIRNH (pour Belgian Interuniversity Study on Nutrition and Health), datant du milieu des années 80. Celles-ci confrontent les concentrations sanguines en sélénium au risque de mortalité par cancer.
Sélénium et provitamine A
Les concentrations en sélénium du sérum de 201 personnes décédées par cancer durant BIRNH ont été comparées à celles 603 personnes en bonne santé, du même sexe et du même âge. Résultat : le sélénium est un marqueur puissant et indépendant du risque de cancer… au même titre que le bêta-carotène alimentaire : tous deux exercent un effet protecteur, alors que le tabagisme agit dans l'autre sens.
Une nuance cependant : l'effet protecteur n'est significatif que chez les hommes. Chez ceux présentant les apports les plus bas en sélénium, le risque de mortalité par cancer est multiplié par 2.2 par rapport aux individus de sexe masculin ayant les apports les plus importants en sélénium. Ce risque est multiplié par 2.5, en cas de faible apport en bêta-carotène, mais toujours chez l'homme.
Dans les deux sexes, cependant, les effets néfastes de la cigarette se traduisent aussi par une augmentation de la mortalité par cancer, même si l'amplitude est moindre chez la femme (risque multiplié par 1.6 contre 2.9 chez l'homme).
Tous ou presque
Tous les cancers, à l'exception du cancer de la prostate et des tumeurs cérébrales, se trouvent associés de façon significative aux concentrations sanguines en sélénium… seulement chez l'homme.
Les auteurs de l'étude avancent deux explications à cette différence entre les sexes. Soit ce sont les cancers les plus sensibles à la déficience en sélénium qui sont plus souvent rencontrés chez l'homme, soit la femme est moins sensible à de faibles concentrations en sélénium que l'homme.
Selon le Prof Jean Nève (Institut de Pharmacie, ULB), un des coordinateurs de l'étude, les concentrations sanguines en sélénium observées reflètent des apports alimentaires moyens de l'ordre de 50 mcg par jour. Ceux-ci sont donc, en Belgique, légèrement en dessous des apports journaliers recommandés (70 mcg par jour). Peut-être en raison de la faible place accordée aux produits de la mer (les sources les plus riches, en particulier les crustacés) dans notre assiette…
Nicolas Guggenbühl
Diététicien nutritionniste
Source :
Kornitzer et al. European Journal of Clinical Nutrition 2004 ; 58, 98-104 |