Health and Food
89 été 2008
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La palette des espèces bactériennes élues au statut de probiotiques s’élargit constamment. Les genres que l’on retrouve le plus fréquemment dans l’alimentation humaine sont représentés essentiellement par des bactéries lactiques, plus particulièrement Lactobacillus et Bifidobacterium. Aujourd’hui, ils sont largement utilisés dans la fabrication de produits laitiers fermentés. Plusieurs études récentes leur ont été consacrées. Nous envisagerons ici quelques-uns des effets des bifidobactéries sur la santé.
Une communauté très active
Notre intestin héberge une quantité phénoménale de bactéries, estimée à 1018 cellules. Les espèces y sont très nombreuses mais la plupart ne sont pas caractérisées ou sont difficiles à cultiver. Cette flore de l’intestin humain représente une communauté microbienne extrêmement complexe, dans la quelle les différents micro-organismes ont, par leurs multiples activités, un impact significatif sur la physiologie humaine. Par ailleurs, une analyse comparative des bactéries contenues dans l’intestin humain a révélé que ces microorganismes utilisent stratégies très diverses pour s’adapter à l’environnement intestinal.
Les nouvelles approches utilisées dans la culture bactérienne ont révélé que l’embranchement (phylum) des bactéroidetes et celui des firmicutes constituaient la majeure partie de la flore intestinale humaine. Les bifidobactéries entrent dans le phylum des bacteroidetes. Comme pour les autres bactéries, leurs activités sont multiples. Ces bactéries assurent, par exemple, une activation significative du métabolisme des acides aminés, un turnover des xénobiotiques (*), la méthanogénèse, la biosynthèse des vitamines… Dans un modèle murin, la co-colonisation intestinale par des bifidobactéries, conjointement avec certaines autres espèces, permet d’élargir la diversité des polysaccharides qui peuvent être dégradés dans le milieu environnant et favorise l’expression de gènes de l’hôte impliqués dans l’immunité innée.
Des aiguillons pour l’immunité
Un des effets positifs sur la santé attribué aux probiotiques est leur action sur le système immunitaire. La modulation de certains paramètres de la réponse immunitaire par les probiotiques suscite actuellement de plus en plus d’intérêt, compte tenu des problèmes d’ordre immunologique rencontrés chez l’homme, qu’il s’agisse d’infections, d’allergies ou autres déficiences immunitaires.
Chez l’enfant, la colonisation de l’intestin par des bifidobactéries est essentielle car elle stimule la maturation du système immunitaire. Dans un model animal, Ménard et coll. ont montré qu’en absence de colite sévère, Bifidobacterium breve (B. breve) peut renforcer la capacité de la barrière intestinale et stimuler la réponse immunitaire utilisant les lymphocytes T-helper1 (Th1). Dans une autre étude réalisée in vitro, on a montré que le surnagent de B. breve peut induire la maturation des cellules dentritiques et prolonger leur survie à travers une action sur les « toll-like récepteurs » de type 2 (TLR). Ces propriétés pourraient correspondre à un profil régulateur des cellules dendritiques, si importantes dans le fonctionnement de la réponse immunitaire.
Très tôt déjà
Chez l’enfant, les probiotiques permettent d’assurer une normalisation de la perméabilité intestinale, d’augmenter les fonctions protectrices de la barrière intestinale et de diminuer la réponse inflammatoire avec réduction de la production des cytokines pro-inflammatoires.
Les bifidobactéries et les lactobacilles colonisent massivement le tractus gastro-intestinal du nouveau né rapidement après sa naissance et grâce à son exposition à la flore maternelle.
Ce processus reste incomplet et s’achève progressivement jusqu’à l’âge de 2 ans, avec la diversification de l’alimentation et sous l’action de l’environnement extérieur. Li et coll. ont réalisé une étude dans le but d’examiner les effets de l’administration précoce de B. breve à deux groupes d’enfants ayant un faible poids de naissance. Le premier groupe a reçu une dose de 1,6 108 bactéries plusieurs heures après la naissance et le second groupe a reçu la même dose 24 heures après la naissance. Les résultats de cette étude ont montré que chez les bébés du premier groupe, une flore dominée par Bifidobacterium est formée deux semaines après la naissance, alors que dans le deuxième groupe, il a fallu quatre semaines. En plus de cela, dans le premier groupe, le nombre des entérobactéries présentes chez les enfants était significativement plus faible que dans le second groupe. Ceci suggère que l’introduction précoce de B. breve chez les nouveau-nés de faible poids pourrait être bénéfique.
Ce ne sont là que des exemples un peu disparates mais ils montrent bien l’étendue de l’intérêt que l’on peut attendre des probiotiques. Et les recherches n’en sont qu’à leur début, même si les publications abondent déjà.
La Rédaction
Références
Hoarau C, Lagaraine C, Martin L. Supernatant of Bifidobacterium breve induces dendritic cell maturation, activation, and survival through a Toll-like receptor 2 pathway. J Allergy Clin Immunol. 2006; 11: 696 - 702.
Li Y, Shimizu T, Hosaka A et al. Effects of bifidobacterium breve supplementation on intestinal flora of low birth weight infants. Pediatr Int. 2004; 46: 509 - 15.
Ménard S, Laharie D, Asensio C. Bifidobacterium breve and Streptococcus thermophilus secretion products enhance T helper 1 immune response and intestinal barrier in mice. Exp Biol Med (Maywood). 2005; 230: 749 - 56
Salminen SJ, Gueimonde M, Isolauri E. Probiotics that modify disease risk. J Nutr. 2005; 135: 1294 - 8
Turroni F, Ribbera A, Foroni E. Human gut microbiota and bifidobacteria: from composition to functionality. Antonie Van Leeuwenhoek. 2008 Mar 13. [Epub ahead of print]
(*) molécules de faible masse moléculaire, étrangères à l’organisme, comme des médicaments, les composants de la fumée de cigarette, des polluants atmosphériques, des composés d’origine alimentaire ...
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